Au sud de Salta :
DANGERS SUR L’ALTIPLANO!!!
6 au 8 mars
Salta
Comme il n’y avait pas de place au Bloomers B&B, nous logeons dans une magnifique maison coloniale. L’hôtesse nous recommande le lendemain de nous informer aux policiers avant de prendre la route pour Cachi où nous dirigeons, car elle était encore fermée la veille; elle nous dit que les pluies de cette année sont les plus abondantes des 20 dernières années, mais nous apprendrons plus tard que c’est plutôt assez régulier entre octobre et mars, et que ces routes sont souvent emportées et fermées à cette période. Mais nous sommes confiants, car ce ne peut être pire que ce que nous avons vécu, perdus sur l’altiplano.
Cachi
Avant de prendre la route de montagne du Parque nacional los Cardones (cactus
candelabres), nous nous arrêtons à une station d’essence et leur demandons si nous pouvons passer par la route pour Cachi; en regardant notre petite voiture, ils nous répondent par l’affirmative. Alors nous fonçons.
Et nous montons rapidement dans un col très abrupt et où il est impossible de rencontrer sauf à des endroits prédéterminés; je me prépare donc à devoir reculer parfois, ce à quoi je suis assez habile cependant. Le magnifique paysage est malheureusement rapidement caché par les nuages et la pluie qui nous entourent; et il y a un autobus devant nous qui, même s’il ralentit un peu la progression, nous donne confiance sur la possibilité de passer.
Premier virage en épingle étroit dans ce chemin en lacet : un torrent traverse la route. J’ai
peur, mais l’autobus, plus haut sur roues, traverse et il y a des gens qui dirigent la circulation pourtant rare … et qui me font signe de traverser ce torrent. J’hésite, mais finalement j’y vais car on ne peut ni reculer, ni faire demi-tour à cet endroit. Je prends un élan; sous le torrent, d’énormes cailloux qui brassent l’auto dans tous les sens, et l’eau qui pénètre sous la portière du côté de Marie. Ouf ! je passe, mais j’ai rarement eu si peur de rester en panne, le moteur noyé.
Enfin, me dis-je, le pire est fait. Erreur, de telles situations se multiplient. Jamais d’eau à
ce point, mais souvent nous devons traverser des ruisseaux gonflés alors que la moitié de la route a été emportée et que le précipice qui la borde est de plusieurs centaines de mètres; pendant un certain temps, je peux suivre une camionnette d’un paysan et ce faisant, j’apprends qu’il faut traverser ces torrents du côté précipice, car il y a moins de gros cailloux sous l’eau, puisque le torrent les a fait chuter dans le vide. Par chance, je suis peu sujet au vertige et le fait de conduire me fait oublier la peur; Marie par contre est terrifiée. Au moins, je ne crains pas de rester isolé dans le désert…
A un endroit, ce qui reste de la route toujours traversée par un petit torrent est si étroit qu’on voit devant nous les visages inquiets des passagers d’un autobus, eux aussi terrifiés par le vide auquel pourtant ils devrient être habitués, et nous craignons pour cet autobus qui doit frôler le précipice dans ce virage en épingle. Marie trouve que les photos que j’ai prises de ces traversées (au retour le lendemain !) ne représentent pas réellement les situations vécues; il faut comprendre que ce matin-là, j’ai oublié complètement l’appareil photo sur la banquette arrière, complètement concentré sur la conduite. Le lendemain, la situation était encore pénible, mais le niveau d’eau avait beaucoup baissé et je m’étais un peu habitué.
Nous arrivons finalement sur l’altiplano où il fait soleil; un paysage époustouflant,
venteux, à perte de vue.
Nous aurons plus tard quelques difficultés à trouver à coucher à Cachi, petit bled perdu mais joli et sympathique. Certains hôtels sont pleins, et si le nôtre a de la place, c’est qu’il est victime d’un mal qui ronge l’Argentine du Nord en dehors de Buenos Aires : la siesta. Entre 14 :00 et 16 :30 heures, les tiendas ferment de même que de nombreux restaurants; une chance que les guichets automatiques ne font pas la sieste, car souvent les banques n’ouvrent que le matin. Alors, les proprios de notre hôtel font la siesta et de nombreux clients viennent se cogner le nez à une réception close; nous étions arrivés tout juste avant la siesta.
Cachi est au fond d’une vallée très verdoyante et finalement est beaucoup plus prospère
que tout ce que nous avons vu dans le nord-ouest argentin. L’après-midi, nous faisons une randonnée dans les environs et avons vu quelques-uns des plus beaux paysages de notre voyage; les routes sont difficiles, mais rien à voir avec le col du Parque nacional los Cardones que nous avons parcouru le matin. Cependant, nous ne ferons qu’entrevoir la nevada du Cerro Cachi à plus de 6400 mètres, qui demeurera en partie cachée par les nuages malgré le soleil éclatant dans la vallée.
Au souper, apprenant que nous sommes du Canada (en voyage, nous ne voyons pas
l’utilité de traiter de nos questions constitutionnelles avec des étrangers), notre jeune serveur fait la moue et nous parle d’une compagnie canadienne qui ouvrira bientôt une mine d’uranium au Cerro Tin Tin que nous avons traversé le matin; comme bien des gens, il est très inquiet des impacts environnementaux dans cette région hostile, mais qui est un réservoir d’eau important. Évidemment, nous ne pouvons certes pas le rassurer sur le comportement des minières canadiennes dans le monde. Il devient plus volubile lorsque je lui mentionne que Marie est avocate et travaille contre ces minières irresponsables et sans aucun scrupule comme Barrick Gold et autres philanthropes « inc. ».
Nous lui parlons de la route difficile que nous devons prendre le lendemain (nous retrouverons la célèbre route #40) pour aller à Cafayate à 170 kilomètres de Cachi. Il nous rassure en nous disant que nous devrions passer avec notre petite voiture.
Cafayate
Le lendemain matin, nous partons vers 8 :00 heures am. Évidemment, à cette heure très matinale (le soleil se lève à 7 :00 am, mais se couche à 21 :30 ! ), nous sommes presque les seuls sur la route et je ne peux suivre comme la veille un chauffeur expérimenté du coin. Mais finalement, après ce que nous avons vécu, la route est certes « rough », mais praticable et finalement assez facile à basse vitesse.
Nous nous arrêtons à Molinos, un merveilleux petit pueblo déclaré patrimoine de
l’humanité avec raison. A peu près aucun touriste, sauf quelques français qui sont souvent assez curieux de ce genre d’endroits perdus.
Et nous poursuivons en descendant un col jusqu’à ce que la route soit au niveau de la vallée et de la rivière qui y coule tumultueusement.
Et soudain, surprise ! La route fait place à une mer de boue rouge de 1 mètre de
profondeur; mais une piste de contournement de la route existe et je l’emprunte sur 300 mètres jusqu’au retour vers la route, toujours transformée en une mer de boue à perte de vue, et cette fois sans détour possible. Il y a quelques spectateurs appuyées sur une clôture qui regardent ce qui peut nous arriver, et ils ont près d’eux un cheval, sans doute pour dépanner les aventuriers de la boue. Peut-être un 4X4 passerait-il, ou existe-t-il une façon de passer au travers que connaîtraient les gens du coin ? Mais tôt le matin, nous semblons être les premiers sur la route, et nous devrions expérimenter nous-mêmes cette boue, sous les yeux des quelques spectateurs intéressés.
Nous décidons de ne pas prendre le risque et de faire demi-tour même si nous devrons refaire les 90 kilomètres déjà effectués, nous repayer les 120 kilomètres horribles de la veille et ensuite 150 kilomètres d’une route de montagne asphaltée; je faillis m’embourber ce faisant tant le terrain est gorgé d’eau partout. Une auto qui nous suivait est enlisée et je ne vois pas comment je pourrais l’aider; peut-être le cheval… En fait, nous apprendrons que la route était toujours calculée fermée malgré les informations qu’on nous avait données; mais je crois qu’on n’applique pas les fermetures, laissant les gens prendre leurs décisions. Un peu choquant cependant d’avoir fait 90 kilomètres inutilement, sauf pour les magnifiques paysages et le pueblo de Molinos que nous avons traversés.
Pour épargner environ 30 kilomètres (1 heure de route dans ces routes épouvantables), nous décidons de prendre un raccourci sur l’altiplano en contournant Cachi, nous dirigeant presque directement au très pénible col du Parque nacional los Cardones. Auparavant, nous nous informons au commissariat de police de la petite ville d’où part le raccourci : « Pas de problème avec votre petite voiture ! ».
Et nous prendrons une route déserte où nous ne rencontrerons personne du trajet. Un paysage extraordinaire qui souvent ressemble à Bryce Canyon par les couleurs et les formations rocheuses; mais la route est épouvantable, nous forçant à traverser le lit à sec d’énormes torrents. Je crains une crevaison ou une panne quelconque au milieu d’un de ces lits asséchés… L’orage menace et je deviens alors anxieux et j’ai très hâte de sortir de cette route; alors, oubliez les photos de Bryce Canyon… Nous y parviendrons au moment où la pluie arrive; petit pique-nique vite expédié sous un vent glacial.
Et nous refaisons la route de la veille en la descendant plutôt qu’en la montant; les mêmes
obstacles, mais avec un niveau d’eau beaucoup moindre. La route asphaltée qui ensuite suit la Quebrada de Cafayate est facile et magnifique avec des panoramas superbes; la vallée est parcourue par le Rio de las Conchas tumultueux, menaçant à plusieurs endroits d’emporter la route comme il l’avait déjà fait à une couple d’endroits que nous devons contourner. Mais c’est une grande et importante route, et on la répare au fur et à mesure; certes, il y a beaucoup d’eau à traverser à gué à certains endroits, mais c’est toujours dans les entonnoirs cimentés prévus à cet effet.
Malgré une grande place assez jolie, Cafayate est surtout une ville de vignobles et de
tourisme argentin; on y mange mieux qu’à bien des endroits, mais son attrait réside surtout pour nous dans la route qui la relie à Salta. Nous referons donc la route le lendemain pour retourner à Salta et nous préparer à prendre l’avion pour les grandes cataractes d’Iguaçu.
Album-photos: (Afficher Diaporama pour photos pleine grandeur)
Musique: Los Chalchaleros Folclore Argentino- Grandes Exitos 01 La Nochera