LEÓN ET LA RÉGION DES VOLCANS

Le dimanche matin, nous partons vers León, la vieille ville « libérale », la sandiniste, la résistante à Somoza et autres dictateurs : la ville que nous avons préférée au Nicaragua. La route longe en partie le lac Managua d’où nous distinguons dans le fond les volcans   Momotombo et Momotombito.  Superbe !  Puis nous rejoignons la Panaméricaine vers le Nord.

A un moment donné, un autobus s’arrête et laisse monter des gens en plein milieu de la route; mais comme il y a une ligne continue, pas question de le contourner.  Il démarre, mais s’arrête à nouveau pour faire monter un retardataire; je stoppe à nouveau, et boum !  on heurte l’arrière du camion.  Je sors, et constate qu’une petite Hyundai Accent a embouti l’arrière du Mahindra; à première vue, notre tank n’a rien, mais la petite voiture semble un peu abimée.  Comme nous sommes en plein milieu de la route, je me déplace sur le côté, croyant que la conductrice fera de même.  Pas du tout, et elle gesticule et nous dit que nous devons la dédommager !

Oups ! c’est elle qui nous a frappé par l’arrière…  Mais son chum et elles insistent, et disent qu’ils appellent la police sur leur cellulaire.  Pas trop certains du code de la route nicaraguayen, nous nous inquiétons un peu de l’arrivée d’un agent de la circulation; en tout état de cause, nous téléphonons à Francisco à Managua qui, comme il ne conduit pas, se renseigne auprès de son père.  La loi est la même que chez nous; ils sont responsables, mais nous devrons tenir compte de l’intervention policière pour un règlement « hors cour » si nécessaire.  Mais alors que la jeune conductrice insiste pour que je réponde à sa demande et la suive jusqu’au garage pour évaluer et payer les dégâts (jusque là, Marie entretenait la conversation car son espagnol est infiniment meilleur que le mien !).  Alors là je dis « NON ! , nous allons attendre la police.»  Surprise, la jeune conductrice nous crie « Adios !» et s’en va offusquée, sans attendre la police qu’ils n’avaient probablement jamais appelée.  Je crois que la plupart des gens ne sont pas assurés et qu’ils ne savent pas ce que signifie réellement l’être; alors, son capot abimé lui coûterait probablement beaucoup de « dineros » et elle devait penser que cela nous était indifférent de payer, car nous nous ferions rembourser par l’assurance.  Ou du moins, elle « s’essayait »   !..

Et nous partons aussi assez vite, car les locaux commençaient à s’approcher et évidement les gringos que nous sommes n’ont pas nécessairement la cote; et nous rappelons Francisco pour lui dire que tout était réglé, alors que généreusement il s’apprêtait à venir à notre secours. Fin du dernier incident routier nicaraguayen : aucun dommage au total, mais je mentirais  si je disais que cet aspect du voyage ne nous a pas assez fortement agacés.  Oublions le dernier incident qui ne relève d’aucun système, mais seulement de notre difficulté à composer avec une langue que nous connaissons mal.  Mais je crois que les autorités nicaraguayennes auraient avantage à s’occuper rapidement de la question de leurs agents de circulation et des touristes; sinon, la réputation aidant, les touristes hésiteront avant de louer une voiture et préféreront s’en tenir à des voyages « tout inclus » qui profitent certes aux grandes entreprises étrangères qui possèdent les grands complexes hôteliers, mais pas aux petits propriétaires locaux  d’auberges.

LEÓN, LA VIEILLE DAME RÉVOLTÉE

Nous arrivons finalement à León où nous cherchons notre hôtel pendant près d’une heure, en voiture et à pied; notre GPS nous conduit à un endroit où nous ne voyons pas ledit hôtel, La Casa Leónesa. Nous avons l’adresse, mais personne ne peut même nous dire le nom de la rue où nous sommes stationnés, alors celle de l’hôtel ! Nous finirons par le trouver par déduction à partir de l’emplacement de d’autres hôtels et restaurants dans notre guide Lonely Planet.  C’est compliqué de se repérer lorsqu’il n’y a ni numéro civique, ni même de nom de rue.

Petit hôtel sympathique avec une minuscule piscine dans un patio; mais nous apprécierons sa fraîcheur.  Et nous partons immédiatement vers le Parque central pour bouffer un peu; immédiatement, nous tombons sur le charme de cette magnifique petite ville universitaire, moins léchée mais encore plus riche en histoire que Granada.  De très belles églises, une place centrale magnifique, des musées et quelques restos sympathiques.  En outre, nous y sommes pendant les célébrations du deuxième centenaire de l’Universidad Nacional Autonoma de Nicaragua de  León, la principale des trois universités de la ville.

Ces célébrations se traduisent par des groupes d’étudiants et de professeurs en toge et mortier, des discours sur la grande place, des concerts en plein air, des feux d’artifice, des processions religieuses et tutti quanti…  Outre cela, certains  musées valent le coût, particulièrement celui de la Fondation Ortiz-Guardian qui est le plus grand musée d’art contemporain d’Amérique centrale;  même si nous éviterons les nombreux musées dédiés au souvenir des martyrs de la résistance de León, nous visitons cependant celui de « La XXI & Museo de Leyendas et Mitos », qui installé dans une ancienne prison et centre de torture de la garde nationale de Somoza, affiche des fresques représentant la vie des prisonniers et les tortures subies sur les murs, alors que l’exposition elle-même reprend des personnages de légendes en papier mâché.  Visite instructive, pour le moins bizarre, sinon très recherchée…  Pour les martyrs, nous ferons une exception en passant devant l’hôpital Oscar Danilo Rosales Arguello et le mémorial qui lui est dédié; il s’agit de l’oncle de Danilo, torturé et tué, alors qu’il était encore un tout jeune médecin, par les milices de Somoza.  Un peu émouvant…

LES VOLCANS

Outre ses monuments et sa vie culturelle, León est le cœur d’une région particulièrement fascinante.  Ainsi, nous prenons la voiture pour aller, un peu au sud-est, à  León Viejo le premier emplacement de la ville au pied du volcan Momotombo qui l’a ensevelie sous les cendres en 1610.  Le site lui-même n’a pas grand intérêt, mais nous nous y promenons seuls avec notre guide et pouvons ainsi apprendre quelques rudiments de l’histoire de la colonisation du Nicaragua au XVIème siècle.  Des cruautés incroyables, surtout à l’encontre des autochtones asservis par les conquistadores; même les missionnaires qui essayaient de les protéger ont été assassinés.  Mais ce qui est étonnant, c’est qu’on y retrouve un monument rendant hommage à ces autochtones massacrés; ce n’est certes pas aux USA ou en Argentine qu’on verrait une telle chose.  Dans ce dernier pays d’ailleurs, nous n’avions vu surtout que de grandes fresques racontant l’enlèvement de femmes blanches par les « sauvages », et autres légendes « espagnoles »…

Le site de León Viejo vaut surtout par sa magnifique et catastrophique situation sur les flancs du Momotombo, baigné par le lac Managua.  Les paysages y sont superbes, surtout de l’élévation où se situait alors la citadelle; on y a une vue imprenable du grand volcan et de son petit frère le Momotombito qui s’élèvent à quelque distance dans le lac.  Nous essayons par une petite route de nous rendre sur les flancs du Momotombo, mais l’accès est fermé par une centrale géothermique; le Nicaragua se tourne vers les énergies renouvelables !

Et puis nous avons aussi roulé le lendemain vers le nord de León et l’extrémité septentrionale de la chaîne des grands  volcans nicaraguayens.   Assez tôt après avoir quitté León, les grands volcans Casita, Telica et le majestueux San Cristobal apparaissent à droite et dominent l’horizon.  Nous nous approchons du San Cristobal, qui à 1740 mètres est le plus haut du pays; et non seulement il est haut et imposant, mais son panache de fumée se détache magnifiquement dans un ciel très bleu.  La petite route que nous empruntons, pour nous en approcher, est jalonnée de fermettes très jolies et serpente parmi des champs très fertiles, grâce à la lave qui s’y est accumulée.  Mais en 1998, l’ouragan Mitch, le pire dans les annales météorologiques mondiales, a déversé sur la région 1,9 mètres de pluie en deux jours; quand on pense que l’inondation du Saguenay a été causée par 0,1 mètre de pluie …  Il y eu des milliers de morts suite aux inondations et glissements de terrains subséquents.  Volcans, tremblements de terre, inondations, l’armée américaine et les dictateurs sanglants, rien n’a été épargné à ce pauvre pays.  Pourtant, il se tire bien mieux d’affaires qu’Haïti qui a vécu les mêmes fléaux; un gouvernement surtout orienté vers le peuple depuis la défaite de Somoza en 1980, malgré ses défauts et quelques interruptions néolibérales, a fait une différence marquée.

MONTELIMAR

Comme notre séjour au Nicaragua doit se terminer bientôt, nous optons pour passer nos deux dernières journées sur les bords du Pacifique, mais en nous rapprochant de Managua. Nous devons prendre l’avion au milieu de l’après-midi de la dernière journée et, outre la nécessité d’arriver à l’aéroport quelques heures avant le vol, nous aurons aussi à laisser la voiture chez l’agence de location Hertz. Mais malheureusement, nos premiers choix dans des hôtels de petits villages s’avèrent infructueux, car tout est déjà réservé.  Finalement, nous optons pour un séjour « tout inclus » à l’hôtel Barcelo de Montelimar, situé sur l’emplacement d’une ancienne résidence de Somoza.  Moins « couleur locale », surtout que c’est un lieu de séjour de Vacances Transat et donc de nombreux québécois, le prix s’avère cependant raisonnable comme tout au Nicaragua d’ailleurs.  La route la plus directe pour s’y rendre de León est terriblement amochée par les lourds camions qui seuls y circulent; si les agents de la circulation sont d’autant moins un problème qu’ils y sont aussi absents que les lignes centrales et qu’une bonne partie de la chaussée, j’ai toujours malgré tout une crainte de crevaison dans ces nids d’autruche…

Mais notre séjour à Montelimar est très agréable : si les buffets sont quelconques, le terrain est magnifique, la plage immense et la mer très agréable, même pour le body surfing à notre âge vénérable.  Et les piscines parsèment l’immense terrain, certaines très vastes d’ailleurs.

LE RETOUR

Le 20 janvier, c’est le retour.  Nous quittons donc le matin pour effectuer une centaine de kilomètres jusqu’à l’aéroport; nous partons tôt, car évidemment nous craignons qu’un agent ralentisse beaucoup notre voyage en essayant sinon de nous filer une contravention, du moins un petit bakchich.  Au premier village, nous rencontrons justement deux jeunes agents qui font de l’auto stop pour Managua;  nous acceptons donc généreusement  de faire monter dans la benne de notre camionnette cette « assurance » contre le harcèlement constabulaire. Et cela fonctionne à merveille !  Pour une fois, même si la route est très escarpée et sinueuse, je peux admirer de superbes paysages en toute tranquillité d’esprit.

Une dernière petite aventure lorsque nous rendons la voiture.  On nous charge 360,00$US en excédent pour une assurance qu’on dit obligatoire, malgré l’offre internet de Hertz qui se disait « toutes charges comprises » et le fait que j’avais signé un renoncement à l’assurance supplémentaire pour le déductible et le vol (elle est couverte par ma carte Visa).  Je proteste, mais je ne peux que me plier devant la nécessité de prendre mon vol.  Je suis un peu déçu, car c’est pour éviter de telles situations, que nous avions vécues péniblement dans le passé avec des agences « bon marché », que j’avais opté pour Hertz.

Finalement, je me suis plaint dès mon retour de cette situation à Orbitz (agence du type Expedia avec qui je fais souvent affaires) et à Hertz. Orbitz s’est défilé mais m’a offert un bon de 75$ valable dans une multitude restos aux USA; j’aurai l’occasion de l’utiliser certainement.  Et Hertz vient  de s’excuser et de m’annoncer qu’il me remboursait ces    360$US.  Il faut donc protester, et c’est effectivement plus efficace avec des compagnies reconnues…

Je dois dire que le voyage a été magnifique, et que le Nicaragua est un pays facile et économique à visiter.  Les paysages et les villes et villages y sont exceptionnels, la mer chaude et le choix des petits hôtels et auberges assez bon.  Sauf pour les agents de la circulation du coin de Masaya, l’honnêteté y est de rigueur et notre sécurité n’a jamais semblé menacée.   Mais sachez qu’en tout état de cause, une amende est de 20$US si on se contente de forcer l’agent à nous produire une contravention plutôt que de lui payer un bakchich plus coûteux; plus harassant que réellement coûteux.  Et il semble que les amis de Véronique et Danilo n’aient pas eu ce genre de problèmes; peut-être notre grosse camionette Mahindra !…  En fait, même si c’était plus confortable, une petite Yaris aurait suffi, quitte à effectuer un détour parfois dans des chemins plus ardus, d’autant plus que nous n’étions pas à la saison des pluies.

Et de la mer et de la chaleur facilement et économiquement accessibles… Une découverte.  En fait, même si évidement  le moment le plus marquant de ce périple a été le mariage de Véronique et Danilo et les festivités et rencontres reliées, le reste de ce voyage a été réellement très agréable.

Pour les photos, Ctl-cliquez sur le lien suivant :

LEÓN ET LA RÉGION DES VOLCANS 

… tout en écoutant : Pablo Martinez Tellez, Songs Of Revolutions: «El Niquinomeño»

 

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