Les grands parcs, les grands fauves…
En quittant le lac Eyasi, nous nous passons
par Mbo Wa Mbu (traduction : le Village des Moustiques), petite ville de la région, pour faire des provisions. Marie et moi en profitons pour visiter un peu les environs et évidemment nous devons visiter l’école du coin pour une « obole ».
LE CRATÈRE DU NGORONGORO
Puis nous grimpons à 3000 mètres sur les contreforts de la plus grande caldera intacte au monde : le Ngorongoro. Plus de 22 kilomètres de diamètre, et donc près de 70 kilomètres de circonférence, et jusqu’à 600 mètres de
dénivellation abrupte entre le pourtour et le fond. Nous campons dans ce qui est un village de tentes comme nous n’en verrons pas d’autres lors de ce safari; évidemment, de luxueux Lodges existent aussi sur le pourtour, mais nous ne les verrons pas. Un éléphant vient s’abreuver dans le réservoir d’eau du camping au couchant et la nuit, aller aux toilettes est un peu hasardeux lorsqu’on doit se promener entre les phacochères qui se baladent parmi les tentes.
Craignant les grandes chaleurs puisque nous n’étions qu’à environ 1000 kilomètres au sud de l’équateur, j’avais opté pour des sacs de couchage légers. Nous avons donc énormément souffert du froid les deux nuits que nous avons passées en ce lieu : j’avais oublié que même à proximité de l’équateur, 3000 mètres constituent une altitude amplement suffisante pour des nuits « frettes ».
Mais quel décor ! Disney l’utilisera pour « Le roi lion ». La descente est
vertigineuse avec notre Land Cruiser, mais cela ne nous empêche pas d’admirer ce paysage unique : comme nous sommes à la saison sèche, le lac Magadi est plutôt à sec et ressemble à une immense patinoire de sel sur laquelle évoluent des flamands roses !
Nous ferons différentes expéditions dans le cratère, de l’aube au crépuscule, durant deux jours. Compte tenu de la difficulté de descendre et de remonter, Dowdy nous prépare des boites à lunch.
Nous y avons vu des lions en quantité : en famille, avec de tout petits
lionceaux à la tétée, des couples copulant, des femelles à la chasse (les mâles se contentent de s’alimenter du produit de leurs efforts)… Mais durant la journée, ils dorment au soleil surtout.
Peu d’éléphants, mais les seuls rhinocéros que nous verrons du voyage, et encore, de loin… Et des chacals, des hyènes, des gnous, des
antilopes, des élans, des zèbres, et de nombreux guépards. Comme nous sommes seuls avec James pendant la journée, nous pouvons prendre le temps d’observer longuement les animaux au lieu de passer en coup de vent comme plusieurs groupes que nous rencontrons. La durée et l’intensité des lieux au programme de notre safari nous privilégient grandement sur ce point.
La particularité de ce parc du Ngorongoro est que le décor y devient aussi intéressant que la faune. Et nous n’avons pas l’inconvénient de ceux qui visitent dans des camions découverts, assis par rangée de trois ou quatre passagers ou à six dans des camions comme le nôtre : nous pouvons tous les deux contempler le spectacle du même côté lorsqu’il le faut. Et James est une encyclopédie vivante sur la vie de ces animaux et un pisteur hors pair pour les découvrir. Un des grands moments de nos voyages…
Avant de quitter, nous en profiterons pour visiter un
village Masaï traditionnel, même s’il est réellement organisé pour être une attraction touristique. Ce fût quand même une expérience mémorable que de voir ces magnifiques bergers élancés, de rouge vêtus et dansant avec leur longue chevelure qui s’envolait. Les femmes, surtout les jeunes, portaient d’invraisemblables colliers-carcans et des bijoux très colorés.
Le village est entouré d’une enceinte et les animaux y sont ramenés à la nuit pour les protéger des fauves qui évidemment ne se limitent pas aux frontières floues des grands parcs. L’organisation de tels villages et les revenus touristiques qu’ils en tirent incitent les Masaïs à tolérer qu’un de leurs bestiaux soit quelquefois victime d’un fauve sans qu’ils déclenchent une grande chasse dans les parcs pour éviter de telles prévarications.
Les huttes recouvertes de glaise, comme il se fait même en Afrique
occidentale comme au Mali, sont magnifiques. Et l’enceinte donne un air « organisé » à l’ensemble qui est très harmonieux. Outre la traditionnelle visite de l’école, nous avons aussi rencontré le fils du chef dans sa hutte qui nous a brièvement expliqué comme ils vivaient.
LE SERENGETI
Si nous quittons à regret ce lieu incomparable, nous sommes cependant
immensément soulagés de descendre à des altitudes plus confortables la nuit. Après une longue route poussiéreuse, nous sommes accueillis à l’entrée de la plaine du Serengeti par trois jeunes lions (probablement de jeunes frères chassés de la horde par le mâle dominant) qui surveillent les environs du haut d’un monticule; même James n’en croit pas ses yeux… Un spectacle extraordinaire, incroyable…
Nous campons au milieu de la brousse, à proximité d’un puits pas très r
ecommandable et de toilettes « mémorables ». Nous y passerons trois nuits et serons seuls avec notre guide et notre cuisinier la plupart du temps. Il n’y a pas de clôture, et les hordes circulent à proximité. Une nuit, j’ai cru entendre des barrissements tout près et je craignais que nous soyons piétinés par des éléphants venant s’alimenter à l’acacia sous lequel notre tente était dressée. Mais je m’énervais pour rien : le lendemain, James m’a rassuré en me disant que ce n’était pas un troupeau d’éléphants, qui se tiennent généralement plutôt immobiles la nuit, mais une horde de lions en chasse. J’avais confondu barrissements et rugissements… Et les lions ne s’attaquent que très rarement aux humains qu’ils fuient.
En Afrique, les hippopotames sont les plus grands tueurs d’humains (surtout
sur les cours d’eau où ils sont très territoriaux), avant les crocodiles aux gués et les léopards cachés dans les arbres. Mais toute cette rhétorique bien appuyée n’a pas réussi à me rassurer tout à fait. Je puis vous avouer que je m’assurais de n’avoir pas à sortir faire un pipi la nuit, et je n’ai dormi que d’une oreille pendant tout notre séjour au Serengeti; et ce n’est certes pas Marie qui me rassurait sur ce point. Malgré tout, j’y retournerais n’importe quand…
Nous avons été particulièrement chanceux : nous avons vu deux fois des l
éopards (parfois appelés panthères), le plus beau félin et le plus évasif, car toujours caché. La première fois, tous les guides à 50 kilomètres à la ronde s’étaient donné le scoop par radio et il y avait près d’une dizaine de camionnettes pour admirer un magnifique léopard étendu sur une branche d’un arbre immense, dominant un troupeau d’éléphants. Mais comme nous étions arrivés parmi
les premiers, nous avions une vue incroyable; et nous sommes restés les derniers jusqu’au coucher du soleil, alors que nous devions obligatoirement regagner nos tentes isolées. Nous avons pu voir le léopard se lever sur sa branche pour entreprendre sa chasse vespérale; et ce fût le retour à toute vitesse pour ne pas enfreindre le couvre-feu, ballotés en tous sens, en admirant difficilement un extraordinaire coucher de soleil qui mettait littéralement le feu au ciel, à la brousse et aux acacias.
La seconde fois, une seule camionnette est venue nous rejoindre, mais a dû
quitter vite, car le léopard prenait ses aises à l’ombre d’un arbre; la plupart des gens ne passant que quelques jours dans les grands parcs, ils ne peuvent prendre le temps de s’arrêter et d’attendre que les choses surviennent come nous l’avons souvent fait. Notre attente fut récompensée par un des plus beaux spectacles auxquels nous ayons assisté : un léopard en maraude dans la brousse, et déambulant lentement à un mètre de notre camion. Quel animal superbe !
Évidemment, nous avons vu de multiples lions, dont la traque et l’engourdissement par fléchette d’un gros mâle par une équipe de vétérinaires afin de le marquer, mesurer ou soigner. Ils ont dû faire vite, car une lionne a soudainement décidé d’aller porter main forte à son congénère !
Et des guépards, certains en bandes, mais la plupart en couple de jeunes
mâles frères, semble-t-il. Des félins plus petits que les grands lions ou léopards, mais d’une finesse extrême. Malheureusement, nous n’avons pas pu assister à une course au record du monde de vitesse !
Et enfin, l’impressionnant spectacle du début de la grande migration des
grands troupeaux de buffles, de gnous et de zèbres vers les points d’eau au Kenya, plus au nord. Les gnous et les zèbres se déplacent ensemble, les premiers détenant l’odorat et les seconds la vue et l’ouïe, pour se garder des prédateurs. Ils défilent par milliers sans bruits, tranquillement, à perte de vue…
Bien sûr, j’avais déjà vu un tel exode dans des documentaires; mais c’est autre chose que d’y assister directement. Notre séjour au Serengeti était assez bien calculé, car lorsque la grande migration est terminée, les grands fauves suivent les hordes et l’activité faunique tend à se résumer aux environs des points d’eau assez rares.
Pour voir les photos parfois étonnantes de cette deuxième partie de notre safari, CTL-cliquez sur le lien suivant :
