«Le Triangle d’or est une région montagneuse d’Asie du Sud-Est aux confins du Laos,
la Birmanie (Myanmar) et de la Thaïlande (certaines interprétations y incluent également une partie du Vietnam, voire le Yunnan chinois). Comme le Croissant d’or, qui regroupe l’Afghanistan, l’Iran et le Pakistan, il est l’une des principales zones mondiales de production d’opium depuis les années 1950.»(Wikipedia)
Il y a longtemps que nous désirions aller dans cette région, mais le boycott syndical et international de la Birmanie (Myanmar) et de son régime esclavagiste (les familles devaient fournir un enfant à la junte pour des travaux publics gratuits forcés) nous en avait tenus éloignés. Le début de dégel de la situation politique en Birmanie et la requête des syndicats birmans à la CSI pour lever le boycott, en favorisant cependant les voyages individuels avec de petites organisations, nous ont permis de réaliser ce rêve. Vous trouverez dans les pages qui suivent un compte rendu de ces pérégrinations et des références à des photos pour celles et ceux qui voudront compléter cette lecture.
Quelques mots tout d’abord sur l’organisation de ce voyage : tout d’abord un long vol de 27 heures avec escales à Newark et Tokyo pour finalement arriver à Bangkok. En tout, 23 heures dans un avion, dont un vol de plus de 17 heures : cela devient de plus en plus pénible avec l’âge. Finalement, j’apprécie les escales qui nous permettent au moins de nous dégourdir les jambes. Sauf les vols aller-retour Bangkok-Montréal, l’hôtel à Bangkok, le vol vers Yangon (Rangoon) trois jours plus tard et l’hôtel à cet endroit, nous avons choisi de réserver au fur et à mesure selon nos goûts et découvertes. Très facile par Internet, même au Myanmar.
Le coût pour deux pour un voyage de 40 jours au cours duquel nous ne nous sommes privés de rien, sinon des hôtels internationaux que nous n’apprécions pas particulièrement (mais exceptions à Bagan et à Luang Prabang, nos deux plus longs séjours, pour leur piscine lorsqu’il fait 42C° à l’ombre) : environ 10,000$CAN. Pas donné, mais pas si cher pour un tel voyage avec une qualité d’hébergement et de bouffe très élevée, et de nombreux vols intérieurs. Et les pourboires et les cadeaux sont inclus. Voilà, c’est dit !
Mon carnet de voyage ne sera pas « chronologique », car cela comporterait beaucoup d’anecdotes et peu d’intérêt pour la majorité des gens. J’ai plutôt choisi de vous présenter les différents pays que nous avons visités dans l’ordre suivant : Thaïlande. Birmanie (Myanmar) et finalement Laos. Mais en réalité, nous sommes arrivés tout d’abord en Thaïlande, Bangkok étant la porte d’entrée intercontinentale de la région, et nous avons terminé par un séjour-repos à la mer dans ce même pays, 5 semaines plus tard, avant nos vols de retour de Bangkok; et nous y avons aussi séjourné entre nos périples birmans et laotiens.
«SÀ-WÀT-DEE KÒP !»
DE THAÏLANDE
BANGKOK ET LES ENVIRONS
Nous étions à la recherche d’exotisme : Bangkok n’est certes pas l’endroit rêvé pour
ce faire malgré quelques endroits plus « étranges ». C’est une ville moderne que nous avons finalement peu visitée par décision avant même d’y être, lors de la planification initiale de notre voyage; peu de gens consultés nous semblaient réellement emballés. Rien ne nous a fait changer d’avis lors de notre court séjour. Mais le fleuve Chao Phraya qui s’enroule en boucle autour de la ville demeure en endroit très vivant. A part une ballade pour visiter le palais national et le grand temple Wat Phra Kew, je dois avouer que nous nous y sommes peu promenés. Outre notre arrivée tardive après 36 heures sans dormir ou presque, nous avons dû consacrer notre premier avant-midi à aller nous procurer un visa à l’ambassade du Myanmar.
La visite du palais et du temple le lendemain était intéressante, car les monuments sont
magnifiques, mais la foule très dense (la seule que nous ayons ainsi vécue lors de notre périple) et la chaleur accablante ont un peu gâché ce plaisir. Mais Bangkok, malgré son modernisme, demeure encore une ville d’un pays en voie de développement et les inégalités y sont souvent criantes. En outre, comme dans tous ces pays, il est frappant de voir des
édifices ultramodernes côtoyer des taudis, des hôtels de luxe ou des centre d’achat tout neufs être érigés à côté d’immeubles décrépits et croulants. Et lorsque nous roulons en banlieue et que nous voyons tous les entrepôts et usines, nous percevons très bien où s’est réfugié notre secteur manufacturier.
Par ailleurs, malgré que nous ayons été très bien logés au Siam Heritage Boutique Hotel (où la bouffe était abordable et délicieuse), un malaise nous a habité dans cette ville où l’exploitation sexuelle est toujours présente et où les travestis (lady boys) foisonnent. Ainsi, dans la rue marchande que nous devions emprunter pour aller prendre le Sky Train (métro aérien), par deux fois nous avons vu des jeunes filles alignées sur des chaises à l’extérieur et portant soit un numéro, soit un nom dans leurs mains. « Donnez-moi un numéro 2 et un numéro 14 svp ! ». Et les hommes qui reluquaient n’étaient pas que des touristes, d’autant plus que ceux-ci étaient minoritaires dans le quartier.
Nous avons donc opté pour la dernière de nos trois journées à Bangkok de nous éloigner un peu de la ville et de visiter un site du patrimoine mondial de l’Unesco : Ayuthaya. Bien
sûr, ce n’est pas Angkor, mais néanmoins ce fût une journée agréable consistant à visiter tout d’abord le palais d’été de la famille royale, et ensuite différents temples des XIV et XVème siècles qui ont conservé un charme incroyable, mais difficile à décrire: exotisme, majesté des lieux, spiritualité (plusieurs sont encore utilisés), quiétude (peu de touristes)… Tout cela, et le plaisir de découvrir sans se presser de tels trésors d’une culture qui nous est complètement étrangère.
Notre chauffeur (certes pas un guide, car il ne nous a pas donné beaucoup d’informations sur les lieux visités, mais un peu plus sur la vie des thaïs) nous
amenait d’un endroit à l’autre et nous laissait nous débrouiller à l’intérieur des sites où seuls des guides officiels peuvent agir. Comme nous préférons souvent nous imprégner de l’atmosphère de tels lieux au babillage savant des spécialistes, nous devons en conséquence nous contenter des guides « papier » comme le Lonely Planet ou le Routard; parfois, nous sommes un peu confus devant ce que nous voyons. Mais nous maintenons cette préférence pour l’atmosphère de tels lieux malgré certains inconvénients. Alors, notre visite n’aura pas fait de nous des érudits de l’histoire de cette région, mais de fervents admirateurs.
CHIANG MAI ET LE NORD
Après une dizaine de jours en Birmanie, nous reviendrons donc vers le nord de la Thaïlande, plus précisément la région de Chiang Mai. Il s’agit d’une région très touristique que nous avons visitée surtout grâce à l’insistance de Marie; je n’ai pas regretté, car nous y avons vu de magnifiques paysages et vécu quelques aventures amusantes.
Tout d’abord, nous avons l’un et l’autre beaucoup aimé la vieille ville de Chiang Mai où
nous étions logés à notre premier séjour dans un magnifique petit hôtel boutique, le Rich Lanna House. Certes, les touristes pullulent, mais comme la haute saison achevait, cela demeurait confortable. Chiang Mai recèle de magnifiques temples de style Lanna (un royaume autrefois distinct du royaume Thaï) qui nous ont semblé d’une grande simplicité et d’une grande beauté après l’exubérance birmane. Et même si ces temples sont fréquentés, cela n’a rien à voir avec les foules et la ferveur birmanes.
Chiang Mai est en outre une ville agréable et très vivante, centre névralgique et organisationnel du
tourisme du nord de la Thaïlande; le centre de la ville est petit et se parcourt facilement en marchant. De nombreux hôtels et de très bons restos, des agences de voyage et de trekking en quantité, des musées et de nombreuses pagodes. On peut aussi y faire du shopping tant qu’on veut… Pas de problèmes de sécurité évidents, sinon se méfier comme partout de certains chauffeurs de taxis et de tuk tuk (nos expériences passées ne nous empêchent pas de nous faire prendre à chaque voyage, quoique payer 15$ au lieu de 5$ ne nous ruine pas). Nous avons vécu cependant, comme en Birmanie et au Laos, deux inconvénients : la chaleur (38C° à 42C° en moyenne) et un ciel généralement voilé par les brûlis des rizières auxquels les agriculteurs procèdent en cette fin de saison chaude et sèche. Avis : vous verrez peu de photos avec un beau ciel bleu, sauf si elles ont été prises tôt le matin, même si le soleil était toujours présent. Et encore là !… Mais un avantage aussi lié à cet inconvénient : des touristes beaucoup plus rares en cette fin de saison et des prix souvent à l’avenant.
Mais nous étions venus dans la région non pas pour voir Chiang Mai (qui fût une agréable surprise), mais pour faire une ou des excursions dans les montagnes environnantes. La première nous a mené pendant deux jours jusqu’au Triangle d’or à Chiang Rai, dans l’extrême nord de la Thaïlande, aux confins du Laos et de la Birmanie. Nous avons opté pour une excursion plus dispendieuse, mais qui nous évitait d’être accompagnés d’une horde de touristes. Nous sommes partis seuls avec un chauffeur dans une camionnette très confortable (prévue pour une dizaine de personnes) et une guide d’une incompétence remarquable; à part prier à tous les temples et nous expliquer ses prières pour sa mère et son oncle malades (et probablement pour la loterie dont elle avait acheté une foule de billets), nous n’avons rien appris d’elle ou presque. Et je ne comprends toujours pas qu’elle ait enseigné l’anglais avant de devenir guide et qu’elle détienne un diplôme universitaire en ce domaine : elle le parlait aussi bien que mes profs du primaire à Plessisville qui eux au moins avaient l’excuse de n’avoir jamais entendu cette langue de leur vie !…
Mais quelle excursion avec visites d’un temple troglodyte, de villages autochtones,
avec descente de rapides sur la rivière Nam Kok et promenade à dos d’éléphant, tout cela la première journée ! Et parmi des paysages à couper le souffle très peu « encombrés » de touristes : un rêve. En outre le soir, même si nous logions dans un quartier quelconque de Chiang Rai et dans un
hôtel aussi quelconque, mais confortable et plein de touristes thaïs, nous avons pu nous évader sans notre ineffable guide pour aller souper dans le centre de la ville. C’était la fête et un orchestre de « lady boys » faisait les frais de la musique dans un parc; les rues étaient encombrées de familles et les comptoirs de bouffe se disputaient l’espace avec les kiosques d’artisanat ou, et parfois et, de « bébelles ». Et surtout, ce qui a été à peu près le cas partout pendant notre voyage, nous n’avons jamais été harcelés pour acheter telle ou telle pacotille.
Le lendemain, nous avons commencé la journée par la visite d’un village Karen (peuple qui
vit à la frontière de la Thaïlande et de la Birmanie et qui est un peu ostracisé par l’un et par l’autre) où se côtoyaient diverses tribus, dont certaines abritaient des femmes « girafes » aux longs cous. On ne peut faire autrement que de se sentir coupables d’une certaine curiosité malsaine lorsqu’on va à la rencontre de telles peuplades aux us et coutumes qui, non seulement diffèrent à ce point des nôtres, mais qui rendent des femmes invalides très jeunes; j’ai parfois l’impression de visiter un zoo humain ! Cependant, ces visites touristiques constituent la seule façon réelle pour elles de gagner leur vie et d’acquérir une certaine autonomie
financière, car les durs travaux des champs ne leur sont plus possibles; leurs vertèbres sont à ce point étirés qu’elles ne peuvent plus vivre normalement. Alors, nous ne regrettons pas cette visite, mais nous sommes tristes de constater que cette coutume inhumaine se perpétue même chez de tout jeunes fillettes.
Notre excursion s’est poursuivie ensuite par la visite du centre géographique du Triangle d’or, au confluent de la Nam Kok et du Mékong, où se rejoignent la Birmanie, la Thaïlande et le Laos. En fait, pas grand-chose à voir sinon des monumentales horreurs touristiques dont pourtant la Thaïlande nous avait épargnés jusque là…
Et nous nous sommes ensuite rendus au Wat Rong Khun (White Temple pour les
touristes), pagode moderne et bizarroïde au possible construite «par Chalermchai Kositpipat, un artiste thaï de renom qui a voulu créer un tribut durable à Rama IX, roi actuel de Thaïlande» (Wikipédia). En fait, cet édifice est fascinant par son côté architectural excessif d’une part (sculptures innombrables de monstres, de génies et de dieux, et un édifice doré pour les toilettes publiques –le contraire de ce qui se fait généralement), et par la simplicité de sa monochromie d’autre part.
Nous avons fait finalement une excursion d’une journée, avec un petit groupe cette fois,
dans le Parc national Doi Inthanon, site des plus hautes montagnes de Thaïlande (un peu plus de 2000 mètres). Mais la fumée des rizières cachait tous les panoramas. Visite là aussi de villages Karen (chrétiens cette fois !), de monuments et de jardins en hommage au roi et à la reine (ils sont plus royalistes qu’Harper !!!) et surtout de magnifiques chutes d’eau…
Finalement, sans être une destination internationale de voyage à voir à tout prix, cette région de la Thaïlande est superbe et m’a beaucoup et agréablement surpris; c’est vrai que je m’attendais à peu… Mais un voyage en Thaïlande sans une visite de Chiang Mai et de la région du nord est une erreur. Nous quitterons cette région pour le Laos dont je vous présenterez notre périple dans la 3ème partie de ces chroniques. Pour le moment, transportons-nous au sud de la Thaïlande.
KO SAMUI ET LES PLAGES
À Vientiane (capitale du Laos), vers la fin de notre voyage, nous avons préféré aller nous détendre un peu sur une plage avant de revenir à Pointe-Claire plutôt que de
poursuivre vers le sud du Laos qui nous semblait quand même moins exceptionnel que ce que nous y avions déjà vu. Cependant, nous ne voulions ni résider dans un endroit très achalandé comme Phuket, ni perdre trois jours sur cinq à voyager vers une destination insulaire perdue aux confins de la Thaïlande; nous avons donc opté pour Ko (île) Samui, accessible en une journée d’avion de Vientiane et à une heure de vol de l’aéroport international de Bangkok d’où nous devions prendre notre vol de retour. Mais à Samui, nous avons choisi un hôtel Relais et Châteaux sur une partie de l’île plus familiale, plus paisible, Ban Mae Nam sur la rive nord. Notre hôtel, «The Scent», était magnifique et à prix réduit à cause de la saison; les repas y étaient aussi somptueux, mais très coûteux, et la plage très jolie, mais non baignable (un fond de vase et de rochers).
De là nous avons fait deux excursions avec une même compagnie, le même bateau et
le même équipage; la première fût très agréable, la deuxième horrible. La visite du Parc national marin Angthon nous a réservé de splendides paysages et des activités fort intéressantes : plongée en apnée, excursion vers un lagon, lunch dans un endroit superbe, kayak, baignade, etc. Et le bateau n’était pas plein. Ce fût autre chose le lendemain vers Ko Tao, île que recommandait pourtant le Lonely Planet pour s’isoler. Si la première plongée fût très réussie, on nous a ensuite jeté à l’eau parmi du corail mort, des vieux pneus et des matelas et sommiers rouillés parmi lesquels barbotaient quelques poissons; sur le coup, j’ai cru qu’on voulait nous donner une leçon pratique d’écologie marine. Mais non, on m’a dit qu’il y avait de beaux poissons à voir … parmi ces déchets ! Et après un repas dans la cour arrière d’un débarcadère, on nous a laissés sur une petite île archi-achalandée et pas très propre. Désormais, avant de réserver une excursion avec une compagnie, nous ferons ce que nous faisons souvent pour les hôtels : nous consulterons TripAdvisor pour lequel Marie a d’ailleurs fourni des commentaires cinglants sur notre expérience (d’autres d’ailleurs en avaient commis de semblables pour la même journée).
Mais notre séjour à Ko Samui nous a aussi permis de visiter le soir un village agréable de restos et boutiques (piétonnier) nommé « Fishermen’s Village », mais où aucune barque
de pêcheur ne se pointe. Les soupers sur la plage, dans la douceur du crépuscule, y étaient magnifiques. Et nous avons aussi passé un après-midi sur la grande et splendide plage de Hat Chaweng du côté est de l’île. Il faut croire que les journées y commencent tard et que probablement les nuits y finissent au petit matin, car la plage ne se remplit que vers la fin de l’après-midi. Pour ce faire, il faut vivre selon un autre rythme que celui qui est le nôtre; notre vie errante est d’abord orientée vers les visites plutôt que vers le farniente et la fiesta.
Nous y avons donc terminé notre séjour en Thaïlande et notre voyage dans le Triangle d’or. Remarquez que Marie et moi sommes unanimes : les plages y sont belles (et peut-être encore plus à Phuket où règne cependant un tourisme sexuel très ouvert semble-t-il), mais nous ne croyons pas qu’elles valent près de 30 heures de vol pour s’y rendre et autant pour en revenir. Pour ma part, je ne suis pas certain que même Chiang Mai et le nord que j’ai beaucoup aimés valent cet interminable et pénible vol; mais il est évident que si on va en Thaïlande, on ne peut se permettre de rater ces régions du nord du pays et les beautés qu’elles recèlent.
Dans ma deuxième chronique, je vous parlerai de notre séjour en Birmanie (Myanmar), et là (tout comme au Laos par la suite), notre long périple a trouvé amplement sa récompense.
Vous pourrez consulter d’autres photos sur cette région en cliquant sur le lien suivant: http://sdrv.ms/16H3BrY