3.- TROISIÈME PARTIE : LA CÔTE ADRIATIQUE, SPLIT ET DUBROVNIK
Nous abordons au sortir de la Riviera Liburienne une Croatie plus connue, plus prospère
probablement. Au départ, nous traversons les banlieues très quelconques de Rijeka, gros port industriel; mais la mer, en bas, apparaît quand même invitante. Soudain, sur les hauteurs de Rijeka, nous apercevons la silhouette d’un château médiéval un peu « Walt Disney », mais intriguant.
Nous sortons de l’autoroute et parvenons, grâce aux affiches touristiques à ce château qui jouxte une grosse église comme il y en a tant dans ce pays si catholique, Notre-Dame de Tsrat où le pape polonais Jean-Paul s’est rendu pendant son pontificat. Il me semble que ce sanctuaire soit le summum de religiosité simpliste que nous ayons vu durant ce voyage; je crains que Marie n’allume des lampions comme elle a l’habitude de le faire dans les temples de toutes les religions, sans nécessairement payer l’obole. Mais elle s’abstient…
J
uste à côté, se dresse le fameux château de Tsrat, édifié au XIIIème siècle, mais assez romantiquement rénové au XIXème. D’accord, il faudra repasser pour l’authenticité, mais ne boudons pas notre plaisir… Il e
st bien beau ce château et on y a une vue magnifique de Rijeka. Cela vaut certes l’arrêt lorsqu’il n’y a pas nécessité de se hâter.
Nous poursuivons jusqu’à Senj alors que la route quitte la mer pour les montagnes
de l’arrière-pays. Ici aussi, un château : celui-ci, c’est la forteresse médiévale de Nehaj (XVIème) qui a longtemps tenu tête aux Turcs de l’empire Ottoman, de même qu’aux Vénitiens. Si l’intérieur est un musée de peu
d’intérêt, mais qui flatte le nationalisme croate, la vue de la côte adriatique du haut des remparts justifie la montée des escaliers. Pour le reste, les rénovations semblent plus authentiques qu’à Tsrat.
SPLIT
Nous quittons l’autoroute pour nous rendre à Split au petit hôtel où nous avions réservé une chambre ; l’hôtel se situe juste en dehors de la vielle ville, collé sur les murailles.
Comme à plusieurs endroits en Croatie, ces petits hôtels particuliers sont logés dans de vieux immeubles avec beaucoup d’autres commerces, et on ne les voit même pas de la rue. Ce sont des agences comme Hotel.com ou Booking.com qui nous en donnent les détails, les prix, le chemin pour s’y rendre, etc. Outre le fait que l’intérieur était très bien, l’hôtel merveilleusement situé et les prix raisonnables, le fait qu’il y avait un stationnement intérieur gratuit a emporté notre adhésion. Le stationnement était cependant presqu’à 1 kilomètre, mais le jeune proprio est venu avec nous pour nous montrer la route.Toujours la même amabilité croate qui ne s’est pratiquement pas démentie du voyage.
Et pourtant, j’avais mes préjugés dus à l’histoire (donc à des générations antérieures aux jeunes avec qui nous avons surtout eu des contacts) qui a
vait vu les croates du mouvement fasciste Oustachis devenir de fidèles supporteurs du IIIème Reich et pratiquer une politique d’extermination des serbes, des communistes et des juifs qui y vivaient dans le cadre de l’ancien royaume Yougoslave. Et bien qu’on ait beaucoup parlé de Slobodan Milošević et du massacre des bosniaques à la fin du XXème siècle, on oublie de mentionner que le dirigeant croate d’alors Franjo Tuđman fit une entente avec lui pour se partager la Bosnie-Herzégovine. Mais les croates étant catholiques et pro-occidentaux, on a oublié certains de leurs crimes qu’on a cependant moins facilement pardonnés aux serbes orthodoxes et prosoviétiques. Mais comme pour les allemands, on ne peut tenir les générations actuelles responsables de toutes les ignominies des générations antérieures.
Et malgré ce qu’on m’avait parfois laissé entendre, les Croates se sont montrés affables, chaleureux et très corrects. Évidemment, diront certains, je ne suis pas juif, arabe ou noir et je n’ai pas senti ce racisme qu’on dit présent là comme ailleurs. Si on regarde l’histoire, cette hostilité est surtout dirigée vers les turcs et les serbes, qui d’ailleurs leur rendent bien la monnaie. Pour peu qu’on lise sur l’histoire de cette partie de l’Europe, on comprend que certains auteurs américains parlent des deux guerres mondiales comme des guerres civiles européennes; elles en partagent la caractéristique de cruauté, et à l’échelle nord-américaine, les pays sont si petits…
Mais la Croatie est si belle… Un autre préjugé veut qu’elle soit devenue le lieu de villégiature « cheap » des européens. Peut-être est-ce vrai en haute saison, durant l’été ; mais comme nous n’avons pas fréquenté les stations balnéaires (sauf dans la luxueuse Lovran pour deux jours) et que nous étions à mi-saison, nous n’avons pas connu le tourisme de masse parfois étouffant, sauf peut-être un peu à Dubrovnik et au Parc national de Plitvice (et même là, rien à voir avec l’été semble-t-il !).
Pour revenir à Split, c’est avec Ljubljana l’endroit que j’ai préféré de ce périple. Une ville
historique (l’empereur romain Dioclétien y construisit son palais d’été au IIIème siècle), touristique (de magnifiques monuments et places, et le port de départ des traversiers pour les iles croates), mais aussi commerciale, financière, etc. Les touristes sont certes présents, mais les croates aussi… et pas seulement comme employés des hôtels et restaurants. On ne fait pas que la visiter ; deuxième ville de la Croatie après Zagreb, les gens l’habitent et la vivent…
Dès l’abord, on est émerveillé par le front de mer récemment rénové : d’un côté la vielle
ville, de l’autre le port. Une rangée de cafés et terrasses l’anime; la vue y est superbe, le climat doux et les serveurs assez agréables dans l’ensemble. Et la vieille ville est superbe, axée autour du palais dioclétien; outre la rotonde, on y trouve la
basilique, un temple de Jupiter bien conservé et partout des passages et des places agréables. Et les voutes souterraines qui révèlent des trésors architecturaux en plus de l’animation d’un passage piétonnier commercial.
Il faut aussi dire que cette ville demeure particulièrement agréable le soir, que le climat y
est clément et que nulle part on ne craint pour sa sécurité. Nous y sommes demeurés deux jours entiers et aurions pu y prolonger notre séjour sans crainte d’ennui; même si nous n’avons pas « fait les iles » faute de temps, nous avons parcouru en partie la promenade du Mont Marjan qui offre des vues époustouflantes sur la vieille ville et la
côte. C’est aussi dans ce coin que nous avons pris un des meilleurs repas de notre voyage, soit un plat d’un assortiment de poissons grillés (à prix doux comme dirait Le Routard); mais nous vous suggérons de réserver tôt dans la journée au Konoba Marjan pour y avoir de la place le soir.
Par ailleurs, nous vous déconseillons les ruines romaines de Salona à quelques kilomètres de Split; très « ruines », elles sont éparpillées dans des champs où le soleil tape et sont probablement d’un grand intérêt pour des érudits des antiquités gréco-romaines, et du guide Michelin, que nous ne sommes pas.
LA CÔTE SUD
Nous quittons alors Split pour Dubrovnik. Après quelques dizaines de kilomètres dans les montagnes intérieures arides, la route suit la mer et les paysages de carte postale se
succèdent. Peu de villes… Quelques stations balnéaires que nous survolons du haut des caps… Nous traversons pendant quelques kilomètres la Bosnie-Herzégovine qui a réussi à se négocier une petite enclave marine suite aux dernières guerres des années ’90, lorsque Sarajevo fût détruite et Dubrovnik assiégée par les serbes. Et c’est l’arrivée à Dubrovnik, le point sud ultime de notre périple.
DUBROVNIK
Même si Dubrovnik se situe à l’extrémité méridionale de la Croatie, séparée même du reste
du pays par l’enclave bosniaque, il ne faut pas rater. Les locateurs d’automobiles, dont les assurances ne couvrent que le territoire de la communauté européenne (à moins d’une surprime extravagante), permettent cependant cette traversée qui ne dure que vingt minutes près de la ville bosniaque de Neum. Certes très touristique comme Venise, sa vis-à-vis adriatique, Dubrovnik demeure exceptionnelle et vaut le voyage.
Si on a une voiture, le coût des stationnements à l’extérieur des murailles (la ville n’est que
piétonne) est tel qu’il alourdira fortement le coût de votre hôtel ; nous avons opté, comme la plupart des gens, d’habiter non loin dans la péninsule de Lapad. Nous y avons loué un petit appartement chez des gens charmants où nous pouvions garer notre voiture sur la rue sans problème et sans coût. Un service d’autobus peu coûteux et efficace nous permettait d’aller à notre guise à la ville qui n’était pourtant située qu’à un kilomètre, mais dont le retour impliquait une longue montée qui taxait ma vieille carcasse paresseuse.
La ville a été complètement rénovée après la guerre de l’ex-Yougoslavie; outre certains
vitraux plus récents, seules certaines toitures d’un rouge plus clair témoignent de ce conflit. Nous y pénétrons par la porte Pile où il vaut mieux ne pas s’attarder; en plus du terminus des autobus locaux que nous utilisions, c’est le lieu d’arrivée des autocars des bateaux de croisière. Même à mi-saison, il y a foule le matin; dès la fin de l’après-midi, la ville retrouve cependant un peu de son calme avec le départ des croisiéristes.
C’est probablement une des plus belles villes d’Europe; certes, elle est léchée et parfois un peu artificielle. Contrairement à Split, on n’y vit que de tourisme. Mais ses remparts sont
exceptionnels et je crois que c’est la première chose à faire que
d’en parcourir toute la promenade (entre une ou deux heures selon votre hâte; pour nous ce fût deux heures). Mais il y a foule et il vaut mieux y aller soit le matin tôt, soit en fin d’après-midi; et le soleil tape en journée… Mais ne boudez pas votre plaisir même s’il ne s’avère pas très original avec la foule qu’on y croise.
La ville elle-même est aussi très spectaculaire avec ses places, palais et églises innombrables.
On peut s’y perdre dans de petits passages voutés et escalader des escaliers
interminables vers les murailles. Évidemment, les boutiques diverses et les restaurants fourmillent; nous n’avons cependant pas gardé un souvenir impérissable de ces derniers, sauf pour le service médiocre et les prix élevés. Nous avons été beaucoup mieux servis et à bien meilleur compte dans un grand restaurant surplombant la mer près de notre hôtel; les notes de TripAdvisor, notre guide sur les restos, m’ont semblé un peu complaisantes sur les restos de la vieille vile.
Mais il y a aussi des lieux paisibles comme le monastère des Franciscains près de la porte 
Pile. Ou encore le magnifique palais du Recteur, un musée pas très fréquenté qui renferme surtout une architecture intérieure impressionnante. Et il y a la cathédrale de l’Assomption pas très loin… Par contre, même s’il est très achalandé, le vieux port est superbe et ne doit pas être ignoré.
Mais tant de beautés, dans un endroit aussi fréquenté, deviennent un peu artificielles et
lassantes; on a un peu l’impression de vivre dans un musée. Nous avons donc profité de la première journée maussade de notre voyage pour effectuer une petite visite à Cavtat, une toute petite ville au sud de Dubrovnik; nous y
sommes allés en automobile, mais le bus ou le bateau demeurent des alternatives possibles. Peut-être est-ce le temps nuageux, mais rien ne nous y a émerveillé. D’ailleurs, la pluie s’est mise de la partie en après-midi où nous en avons profité pour nous reposer à notre appartement. Et la pluie cessant, nous en avons opté pour aller prendre un dernier repas dans la ville en soirée. Agréable, même si comme je l’ai dit précédemment, le service est médiocre…
Ainsi se termine cette partie de notre périple croate qui en a couvert la côte adriatique de Rijeka à Cavtat. Je vous reviendrai bientôt avec l’intérieur de la Croatie, soit l’impressionnant Parc de Plitvice, Zagreb et le Zargoje croate..
Si vous désirez voir quelques photos de ce périple adriatique :
Côte adriatique: Split et Dubrovnik
Et je vous quitte sur cette superbe vue de Dubrovnik, captée du plus haut point des remparts :
